Les racines peuvent être arrachées, calcifiées, masquées, dissimulées… et pourtant, ce sont bien elles qui tiennent, font se tenir debout ou alertent sur les dangers. De la rage de dent à la pelade, ce sont les racines qui portent les messages et enjoignent le détenteur du corps à y prêter attention. Invisibles ou livrées au regard, elles endossent une multiplicité de formes ; rhizomatiques ou à la verticale, elles s’insinuent dans la pensée, l’imaginaire et sculptent notre vision du monde, d’un monde biaisé par le prisme dominant.
Les racines que l’on se construit sont bien plus fortes et tenaces que les brindilles de liens arbitrairement imposés. Elles ont pour elles de ne jamais se dissoudre, de laisser un indice de leur échafaudage dans la conscience. Le choix lucide, la responsabilité de la clairvoyance, l’acuité des décisions sont ce qui reste du morcellement détourné. Le motif du puzzle sera désormais différent. Il se gravera, se cisèlera à l’aune d’autres paramètres dictés par la volonté corrosive de comprendre. S’éloignant des postulats de l’enfance, l’intuition ménage ses arrières et transforme les lambeaux en paillettes de savoir.
Cette performance de la danseuse Khady Sarr se propose de mettre en lumière la dualité, celle de ses influences, de la société sénégalaise dans laquelle elle a grandi et subséquemment des tiraillements intérieurs qui hantent les femmes s’inscrivant dans une double-culture. À rebours de la reproduction d’une servilité édulcorée, elle se pose en fer de lance d’une émancipation physique et symbolique où le cheveu, d’ennemi, est devenu allié.